Il eut pour eux toutes les attentions qu’on devoit attendre de l’homme du monde le plus poli ; c’est en effet une très grande politesse de s’emparer des Etats d’un Souverain, de l’en chasser, de les dévaster, & ensuite d’embrasser ses enfans ; il fit ouvrir les boutiques, que la plus juste crainte avoit fermées, il donna un repas à tous les Ministres, il fit jouer un opéra Italien. […] Obliger des Princes à qui on à tout enlevé, de se divertir, & d’aller à l’opéra dans le fort de leur désastre ; peut-on se jouer plus indecemment de l’humanité & des bienséances ? […] Dans le même tems on célébroit à Berlin, par des opéras, la prise de Dresde. […] Le vrai sage blame la musique dans le deuil ; pense-t-on qu’il y approuve l’opéra Italien : Musica in luctu importuna narratio , Eccl. 22, 6. […] Un trait singulier, les prologues de l’opéra vanterent beaucoup dans le tems, l’embassade du Doge de Genes, pour faire des excuses au Roi, au nom de la République, forcé à cette humiliante démarche, par les Galliotes à bombe, & une escadre nombreuse, qui avoit déjà brûlé la moitié de la Ville, prise au dépourvu, par M. du Quesne, & ménaçoit l’autre ; Voltaire rapporte aussi cet événement dans son tems, mais en historien sans exagération.