La mort de la Reine occasionna à Toulouse un différent, le Président du tribunal en ayant vu la nouvelle dans la gazette, fit cesser les spectacles ; les Echevins les firent continuer, disant qu’il faloit attendre les ordres de la Cour, que la gazette n’étoit pas un ordre. Le Capitaine du guet fut mandé, on lui ordonna de prêter main forte pour empêcher la comédie ; ayant voulu obéir, ce pauvre Capitaine fut mis en prison par les Echevins, heureusement huit jours après arrive l’ordre, le spectacle cesse, le Capitaine est délivré ; nouvelle difficulté pour leur rentrée ; faut-il dater leur cessation du premier ou du second ordre ? […] La nouvelle comédie, aussi libre & dissolue pour les mœurs ; fut plus retenue pour la satire, il lui fut défendu de nommer, de désigner les gens. La nouvelle fut plus rafinée, sur-tout quoique dans le fond aussi corrompue, & en devint plus dangereuse ; elle arbora un air de décence, & voila, ou plutôt gâza le vice, pour séduire plus aisément la vertu, & fut le fruit de la molesse, qui naturellement moins bruyante, non par vertu, mais par paresse & amour du plaisir, se couvre d’une fausse politesse, pour être moins traversée : Insana est principum & populorum in ithiones pecuniæ collatio, quâ homines infames de turpitudine sua, & de suo scandalo lucrantur & gloriantur, majol. dies canicul. collat. […] Linguet crut pouvoir hazarder une nouvelle traduction du théatre Espagnol, il a mérité de réussir, sa traduction est bien faite, & il traite judicieusement plusieurs questions dramatiques ; il y a quelques pieces fort longues, (c’est le goût des Castillans) prises de Lopez de Vega, de Calderon, de Guillaume Castro & de quelques autres moins célebres : Lopez de Vega est comme Hardi parmi nous, qui composa huit cents pieces de théatre, il en a donné plus de deux mille ; on appelle ses œuvres, par une fanfaronnade de Castille, l’Océan Dramatique, & il est impossible qu’un si grand nombre de poëmes soient bons ; mais ils sont meilleurs que ceux de notre Hardi.