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70. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — SIXIEME PARTIE. — Comédies a corriger. » pp. 295-312

Valère de son côté peut s’excuser auprès d’Elise, en disant que son intention a été uniquement de gagner la bienveillance d’Harpagon, ce à quoi il est déjà presque parvenu, quoi qu’il ne soit que depuis deux jours auprès de lui, parce qu’il n’a perdu aucune occasion de flatter sa passion pour l’argent ; il peut ajouter que son dessein est de persuader à son père, avec le temps, de consentir à marier sa fille, chose à laquelle peut-être il ne penserait jamais pour s’épargner la dot qu’il faudrait lui donner en la mariant : qu’en attendant il aurait le temps d’avoir des nouvelles de ses parents, comme on lui en faisait espérer, et qu’en cas qu’il parvint à les trouver, il se flattait que le goût qu’Harpagon aurait pris pour lui le déterminerait aisément en sa faveur par préférence à ses Rivaux ; d’autant plus qu’il croirait être en droit de lui moins donner qu’à tout autre. […] Elise lui réitére l’ordre qu’elle lui avait déjà donné de n’entrer jamais dans une chambre où elle se trouverait seule ; elle lui défend d’oser jamais lui parler à l’écart, même devant des Témoins ; enfin elle veut que si dans le terme de huit jours, il n’a pas des nouvelles de ses parents, il trouve un prétexte pour sortir de la maison : et supposé qu’il n’en sortit point, elle jure (malgré les favorables dispositions où elle est en sa faveur) de le découvrir elle-même à son père pour le faire chasser, ou de s’enfermer dans un Couvent, afin de ne le plus voir de sa vie, etc.. […] Je demande donc qu’on retranche, ou du moins qu’on corrige ces endroits, et pour lors cette Pièce serait très bonne pour le nouveau Théâtre : elle corrige un défaut commun à presque tous les hommes qui prennent aisément l’alarme sur de fausses apparences, et se livrent souvent à des résolutions imprudentes et dangereuses.

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