Quand on voudra faire l’apologie de la décence du théatre, ce n’est pas apparemment le théatre Italien, celui de la foire, l’opéra comique, les spectacles des boulevards, les parades de Vadé, &c. qu’on citera pour modèles, ni ce nombre infini de spectateurs qui s’en amusent, qu’on donnera pour témoins irréprochables, sur-tout par leurs bonnes mœurs. […] C’étoit une espèce de foire, où il vint de toute sorte de Marchands débiter leurs marchandises, entr’autres trois cens Batteleurs & quatre cens Courtisannes, l’un ne va point sans l’autre, quoique à la vérité ce nombre soit un peu fort. […] Les Anglois, qui y étoient en grand nombre, le régalèrent à son entrée par une piece de théatre ; ils exercèrent plusieurs de ces batteleurs, & se signalèrent par un spectacle nouveau pour l’Allemagne, d’où il se répandit dans toute l’Europe, & singulierement en France, où l’on vit depuis des troupes de Confrères qui représentoient des mystères. […] On s’en embarrasse si peu que les Acteurs y sont mauvais, mal payés & en petit nombre. […] Quelques Princes, qui y sont en grand nombre, ont daigné monter sur le théatre pour jouer, & tailler leur plume pour composer, ce qui fait plus d’honneur au théatre qu’au trône, & qui aparemment n’ira pas loin.