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91. (1744) Dissertation épistolaire sur la Comedie « Dissertation Epistolaire sur la Comedie. — Reponse à la Lettre précedente. » pp. 19-42

Nôtre cœur, tel qu’il soit, a une dureté naturelle, un fond de corruption, une opposition à la pieté : de là vient cette grande peine, qu’il a à goûter les choses divines. […] Il est de la foi, qu’une vie purement naturelle ne nous conduira jamais au salut : une fin surnaturelle ne s’acquiert, que par des moiens, qui visent plus haut que la nature. Or la vie de cette Demoiselle n’est-elle pas toute naturelle, & rien davantage ? […] Après avoir vû cette passion si bien depeinte sur le Theatre avec toutes les couleurs de la parole, d’une expression douce, & de la declamation ; cette Fille commence à sortir de la sainte ignorance où elle éroit, & ce que la nature ne lui avoit pas encore appris, des Comediens & des Comediennes le lui apprennent comme les nouveaux maîtres de son prémier malheur, Ce métier apris à une si mechante école est secondé par les inclinations naturelles, & il ne laisse que les idées d’une douce passion ; ces idées lui reviennent souvent, & elles attaquent son innocence : il faut un miracle de la droite du Seigneur pour qu’il ne lui arrivent de grandes chûtes, qui, quoiqu’elles ne se commettent qu’interieurement, déviennent presque incurables, & entrainent la plûpart, qui les font, à la damnation éternelle.

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