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370. (1694) Réfutation des Sentiments relâchés d'un nouveau théologien touchant la comédie « Réfutation des sentiments relachés d'un nouveau Théologien touchant la Comédie. » pp. 1-190

C'est en effet ce qui ne se peut accommoder, et c’est pour cela qu’il condamne même ceux qui pourraient y assister avec modération, et avec quelque espèce de sûreté par rapport à leur dignité, à leur âge ou à leur naturel ; parce que s’ils y cherchent le plaisir, il n’y a point de plaisir sans affection et sans émotion, puisque c’est elle seule qui le procure et qui le fait goûter ; s’ils n’y cherchent pas le plaisir, c’est donc un vain amusement qui les y attire, et dont ils sont coupables. « Si cessat affectus, nulla est voluptas, et est reus jam ille vanitatis. […] D’ailleurs quoiqu’on n’y nomme pas les personnes que l’on peut avoir en vue quand on déclame contre quelque vice, ne sait-on pas qu’on y fait bien souvent des portraits si naturels, qu’il n’est pas difficile d’y reconnaître les originaux. […] Le désir, et le dessein de plaire, est ce qui conduit l’Auteur et qui anime l’Acteur, celui d’être touché, est ce qui attire le spectateur : ce qui ne pouvant s’exécuter sans que les passions soient excitées, il est évident que tout le but de notre Comédie est de les exciter, que ce n’est pas par hasard qu’elle les excite, et quoiqu’elle ne les excite pas toujours, c’est contre sa véritable fin et son principal dessein ; qu’il est toujours vrai de dire qu’elle les excite dans un grand nombre, qu’elle peut les exciter dans tous, et qu’elle le doit même faire plus ordinairement, si on considère de bonne foi, quel est l’empire naturel d’une représentation vive, jointe à une expression passionnée sur le tempérament des hommes.

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