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264. (1685) Dixiéme sermon. Troisiéme obstacle du salut. Les spectacles publiques [Pharaon reprouvé] « La volonté patiente de Dieu envers Pharaon rebelle. Dixiéme sermon. » pp. 286-325

Voilà M. le doux poison de la vie civile & la maladie contagieuse qui corrompt les meilleurs naturels, lors qu’ils imitent plutôt les vices d’autruy qui nous entraînent par une force agreable, & qui flatte la nature, que les vertus qui nous attirent par un charme contraire, qui choque ses inclinations : & c’est si je ne me trompe cette pernicieuse inclination d’imiter tout ce qui se passe dans le monde, qui a donné le commencement à la comedie, & la naissance aux Comediens. […] Voilà M. le portrait au naturel que Jesus-Christ a fait de ce monde auquel vous avez renoncez par le vœu de vôtre Baptême ; cependant que fait le Chrétien qui a tant d’amour pour les spectacles & les comedies, je dis que c’est un transfuge & un deserteur, qui au prejudice de son vœu & de ses promesses, passe du monde de Jesus-Christ, qui est l’assemblée des fideles, dans le monde du diable, qui est l’assemblée des reprouvez. […] Comme Dieu qui en est le Createur, est infiniment bon, il leur a fait part de sa bonté, en les tirant du neant pour leur communiquer l’être ; & comme le diable qui est leur corrupteur, est extrêmement méchant, il leur a fait part de sa malice, en les tirant de leur état naturel, pour les faire servir, non pas à l’utilité & au salut de l’homme, selon le dessein que Dieu en avoit eu, mais à sa damnation & à sa perte, selon le projet qu’il en a formé. […] Il ne nous conduit aussi, & ne nous conserve dans cét état que par l’esprit de penitence & de mortification, qui fait mourir le vieil homme avec toutes ses passions, & qui crucifie la chair avec toutes ses concupiscences : mais comme l’homme a une aversion naturelle pour tout ce qui gene sa liberté, & qui fait violence à la nature, & que d’ailleurs il a un furieux panchant pour tout ce qui peut flater ses inclinations corrompuës, & luy donner du plaisir : que fait le demon, il se met entre deux, & prend une conduite qui contrarie les desseins de Dieu, & qui flate les passions de l’homme : & afin d’empêcher, ou de corrompre cette sainteté à laquelle nôtre profession nous oblige, il nous attire si fortement à luy par l’amorce des plaisirs de la vie, qui sont les veritables poisons de la sainteté, que Tertullien nous assure que dans la naissance de l’Eglise plusieurs furent detournés de se faire Chrétiens plutôt par la crainte de renoncer au plaisir, que de perdre la vie, plures invenias quos magis periculum voluptatis, quam vitæ avocet ab hac sectaL. de spect. c. 2.

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