N’est-ce pas un effet nécessaire de la constitution des choses, que le méchant tire un double avantage, de son injustice, et de la probité d’autrui ? […] Pourquoi, direz-vous, supposer cette opposition nécessaire ? […] Le peuple Genevois ne se soutient qu’à force de travail, et n’a le nécessaire qu’autant qu’il se refuse tout superflu : c’est une des raisons de nos lois somptuaires. […] Sera-ce en retranchant, sur les dépenses nécessaires auxquelles suffit à peine son modique revenu, de quoi pourvoir à celle-là ? […] Il en est de ceci comme des impôts sur le blé, sur le vin, sur le sel, sur toute chose nécessaire à la vie, qui ont un air de justice au premier coup d’œil, et sont au fond très iniques : car le pauvre qui ne peut dépenser que pour son nécessaire est forcé de jeter les trois quarts de ce qu’il dépense en impôts, tandis que ce même nécessaire n’étant que la moindre partie de la dépense du riche l’impôt lui est presque insensible56.