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58. (1767) Réflexions sur le théâtre, vol 6 « Réflexions sur le théâtre, vol 6 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SIXIÈME. — CHAPITRE I. Faut-il permettre aux femmes d’aller à la Comédie ? » pp. 4-29

Sans élever aucune barriere entr’elles & la mauvaise compagnie, qui toujours s’y rassemble, nous les laissons pêle mêle avec le premier venu que le libertinage y amène, nous les excusons, nous les applaudissons, nous les y engageons, nous les faisons monter sur le théatre public, nous leur élevons dans les maisons des théatres de société, nous leur laissons apprendre les arts empoisonnés qui y séduisent, nous les louons de leurs succès, ou plutôt de nos défaites, tandis que nous laissons imprimée sur le front des Comédiens la tache de l’infamie légale, du mépris public, & des anathèmes de l’Eglise. […] Elles ne fiègent point sur les Tribunaux, ne plaident point au barreau, ne montent dans les chaires que chez les Anabaptistes ; elles n’enseignent point dans les écoles, tout au plus quelque Ursuline ou quelque Régente particuliere apprend à lire aux filles. […] Ces Actrices montent & descendent en se jouant dans les machines, elles effraient, & font baisser les yeux les plus intrépides. […] Le théatre est précisément monté dans le goût des femmes, & assorti au caractere & aux foiblesses de leur sexe ; il flatte, il favorise toutes leurs passions, il semble n’être fait que pour elles.

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