Ces Visigots avoient la barbarie de confondre tout sous le nom de grammaire, & disoit grossièrement que la Reine alloit au Collège, que la Suède étoit gouvernée par des Grammairiens, qu’on ne pouvoit l’aborder qu’à travers une armée de pédans, ni obtenir d’elle un moment d’audience ; on prétend même que Moliere la joua dans les Femmes savantes, & il est vrai qu’il y joua l’Abbé Menage, l’un des protégés & des plus zélés panégyristes de Christine, mais pourtant d’une manière couverte ; elle eut pu se plaindre à la Cour & lui faire des affaires ; ce qui choquoit le plus les Suédois, c’est que les finances qui sont médiocres en Suède, se dissipoient en pensions & en présens pour des étrangers auxquels les Sujets n’avoient point de part, & il est vrai que le trésor se trouvoit épuisé lorsqu’elle quitta le Royaume pour courir après les Savans ; il n’y avoit point de quoi payer la pension qu’elle se réserva, & qu’on croyoit fort mal employée pour eux. […] Comment sans ce secours se soutenir sur la trône ou les plaisirs assiégent, où les tentations attaquent en soule, où les occasions les plus délicates s’offrent à tout moment ?