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214. (1666) Seconde Lettre de Mr Racine aux deux apologistes des Hérésies Imaginaires « De Paris ce 10. Mai 1666. » pp. 193-204

Jetez-vous dans le petit nombre de ses défenseurs, commencez à faire les importants, mettez-vous dans la tête que l’on ne parle que de vous, et que l’on vous cherche partout pour vous arrêter, délogez souvent ; changez de nome si vous ne l’avez déjà fait, ou plutôt n’en changez point du tout, vous ne sauriez être moins connus qu’avec le vôtre : surtout louez vos Messieurs, et ne les louez pas avec retenue. Vous les placez justement après David, et Salomonf, ce n’est pas assez : mettez-les devant, vous ferez un peu souffrir leur humilité, mais ne craignez rien ; ils sont accoutumés à bénir tous ceux qui les font souffrir. […] Pour les Pères, c’est à vous de nous les citer, c’est à vous, ou à vos amis de nous convaincre par une foule de passages que l’Église nous interdit absolument la Comédie en l’état qu’elle est, alors nous cesserons d’y aller, et nous attendrons patiemment que le temps vienne de mettre les Jésuites sur le théâtre. […] Sans mentir ils ont toute une autre manière d’écrire que les Faiseurs de Romans, ils ont toute une autre adresse pour embellir la Vérité, ainsi vous avez grand tort quand vous m’accusez de les comparer avec les autres ; je n’ai point prétendu égaler Desmarets à M. le Maistre, il ne faut point pour cela que vous souleviez les Juges, et le Palais contre moim, je reconnais de bonne foi que les Plaidoyers de ce dernier sont sans comparaison plus dévots que les Romans du premier ; je crois bien que si Desmarets avait revu ses Romans depuis sa conversion, comme on dit que M. le Maistre a revu ses Plaidoyers, il y aurait peut-être mis de la spiritualité, mais il a cru qu’un pénitent devait oublier tout ce qu’il a fait pour le Monde.

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