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170. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre V. Le but des auteurs et des acteurs dramatiques est d’exciter toutes les passions, de rendre aimables et de faire aimer les plus criminelles. » pp. 51-75

Je veux bien supposer que les spectateurs, renvoyés avec cette belle maxime, n’en concluront pas que le crime a donc un prix de plaisir et de jouissance ; mais je demande enfin de quoi leur aura profité la pièce où cette maxime est mise en exemple ? […] Ajoutez que l’auteur, pour faire parler chacun son caractère, est forcé de mettre dans la bouche des méchants leurs maximes et leurs principes, revêtus de tout l’éclat des beaux vers, et débités d’un ton imposant et sentencieux pour l’instruction du parterre. […] Son plus grand soin est de tourner la bonté et la simplicité en ridicule, et de mettre la ruse et le mensonge du parti pour lequel on prend intérêt : ses honnêtes gens ne sont que des gens qui parlent, ses vicieux sont des gens qui agissent, et que les plus brillants succès favorisent le plus souvent ; enfin, l’honneur des applaudissements, rarement pour le plus estimable, est presque toujours pour le plus adroit. […] « Cependant ce caractère si vertueux est présenté comme ridicule ; ce qui démontre que l’intention du poète est bien de le rendre tel, c’est celui de l’ami Philinte, qu’il met en opposition avec le sien. […] Enfin est-ce pour prendre des leçons de sagesse, que tant de désœuvrés vont journellement courir à des spectacles, où, peu attentifs à la pièce, on les voit perpétuellement voltiger autour d’une troupe de sirènes, qui mettent tout en usage pour entraîner dans leurs pièges ceux dont elles ont irrité les désirs ?

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