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43. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 4 « CHAPITRE IV. Suite des effets des Passions. » pp. 84-107

On se moque avec raison de ces Casuistes accommodants, qui à la faveur d'une supposition chimérique, permettent de désirer un objet mauvais s'il n'était pas défendu : Je désirerais cette femme, si j'étais son mari ; le bénéfice de cet Evêque, s'il était mort ; de faire mourir cet ennemi, s'il était soldat dans l'armée ennemie, etc. […] Andromaque, Iphigénie, Bérénice, ne firent jamais un bon mari, un bon père, un bon maître ; trop heureux, s'ils ne le rendent infidèle, dur, intraitable, prodigue, et ne font détester leurs héroïques transports ! […] Je pardonnerais à la comédie de ne troubler la paix du cœur que pour les exciter ; mais sans jugement téméraire on peut lui prêter des vues moins sublimes : la haine d'un mari jaloux, d'un père vigilant, l'orgueil impie ou rebelle contre Dieu ou contre son Roi, la surprise d'un coup de théâtre, la pitié pour un amant malheureux, la joie du succès de quelque fourberie ; tels sont les orages que les vents et les flots de la représentation font éprouver au frêle vaisseau d'une vertu commune. […] Le mari survient, insulte l'Abbé, et le chasse. […] Une tendre mère, une épouse fidèle s'amuse-t-elle à la représentation de la mort de son fils, de l'assassinat de son mari ?

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