Tout cela est inconnu à l’Auteur : il ne connoît que la nature & les vertus morales, un bonheur ou un malheur temporel du vice & de la vertu. […] Se complaire dans les malheurs d’un ennemi, c’est vengeance ; mais s’amuser des malheurs d’une personne indifférente, étrangere, inconnue, c’est un penchant monstrueux, horrible, dénaturé. […] Quelle satisfaction peut trouver un bon cœur à voir les fureurs d’Oreste, les malheurs d’Œdipe, le désespoir de Phedre, l’assassinat de la sœur d’Horace ? […] La nation théatrale devient nécessairement cruelle, sans douceur, sans charité, sans compassion, insensible aux malheurs du prochain, à la misere des pauvres, querelleuse, difficile dans le commerce, brusque, intraitable dans la famille, dure à ses domestiques. […] La modestie, l’honneur, la fidélité sont ses premieres victimes ; il n’y a point d’affection déréglée dont les caprices impérieux excitent tant d’orages, & poussent la créature plus directement au malheur.