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24. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 4 « CHAPITRE II. Le Théâtre purge-t-il les passions ? » pp. 33-54

J'en conviens, c'est son malheur, et la source de ses fautes. […] Nous mettons les préjugés à la place des vertus ; dans les personnages intéressants nous faisons presque aimer les faiblesses par l'éclat des vertus que nous y joignons ; dans les personnages odieux nous affaiblissons l'horreur du crime par de grands motifs qui les élèvent, ou de grands malheurs qui les excusent. […] Pourrait-on croire qu'un peuple entier dont les dehors sont si humains, se plaise à la représentation des malheurs et des crimes qui l'ont avili ou accablé dans ses semblables (c'est le brun sombre) ? […] quel plaisir peut trouver la vertu dans le tableau animé des péchés qu'elle déteste, et des malheurs dont elle gémit, dont elle voudrait anéantir jusqu'à l'idée ? […] Un effet inévitable du mélange du bien et du mal, c'est de faire perdre les idées justes des vrais devoirs, du vrai bonheur, du vrai malheur de l'âme, et d'y substituer un système tout différent, dont on est fort satisfait, parce qu'il est conforme à la nature.

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