L’on croit s’assembler au spectacle, et c’est là que chacun s’isole, c’est là qu’on va oublier ses amis, ses voisins, ses proches, pour s’intéresser à des fables, pour pleurer les malheurs des morts, ou rire aux dépens des vivants ; de manière qu’on pourrait dire de ceux qui les fréquentent : N’ont-ils donc ni femmes, ni enfants, ni amis, comme répondit un barbare, à qui l’on vantait les jeux publics de Rome ? […] victimes de nos applaudissements insensés, n’apprendrons-nous jamais combien mérite de mépris et de haine tout homme qui abuse, pour le malheur du genre humain, des talents que lui donna la nature ! […] Loin que ses tristes effets rebutent, il n’en devient que plus intéressant par ses malheurs mêmes. […] Ce Philinte est le sage de la pièce, un de ces honnêtes gens du grand monde, dont les maximes ressemblent beaucoup à celles des fripons, de ces gens si doux, si modérés qui trouvent toujours que tout va bien, parce qu’ils ont intérêt que rien n’aille mieux ; qui sont toujours contents de tout le monde, parce qu’ils ne se soucient de personne ; qui, de leur maison bien fermée, verraient voler, piller, égorger, massacrer tout le genre humain sans se plaindre, attendu qu’ils sont doués d’une douceur très méritoire à supporter les malheurs d’autrui. […] Qu’un cordonnier, qu’un tailleur fassent mal une chaussure ou un habit, c’est un malheur facile à réparer, et qui retombe à la fin sur eux-mêmes ; mais qu’un homme en place se conduise mal, la patrie entière s’en ressent, et souvent la plaie devient incurable.