Ils pensaient, ces amis de la religion, que les prêtres auraient suivi, au moins de loin, les progrès que l’esprit humain a faits par les discussions philosophiques de tout un siècle, et par l’éloquence persuasive et retentissante de la presse ; qu’ils auraient banni ces controverses absurdes ou inintelligibles que, dans des temps d’ignorance, les avaient soutenues le fer et la flamme à la main. […] Et enfin, lorsque son successeurd, d’abord accueilli par le peuple, est tombé entre les mains des prêtres, ceux-ci, profitant de son âge et de sa faiblesse, ont exploité les erreurs d’une jeunesse fougueuse qui, cependant, lui avaient valu le surnom de chevalier français. […] Sera-ce l’immobilité des corps, l’abandon de toutes nos facultés, l’oisiveté, l’ennui, compagnon inséparable de l’oisiveté ; la prière, la méditation, la méditation plus pénible pour la plupart des hommes que le travail des mains, et, enfin, vos sermons intolérants, et, qui pis est peut-être, si ennuyeux ? […] Ainsi donc, riches, renoncez à vos festins sensuels, à vos réunions corruptrices… Princes : pourquoi ces fêtes brillantes dans lesquelles les femmes disputent entre elles de grâce, d’élégance, de toilettes et peut-être de coquetterie, fêtes qui ne sont autre chose que les pompes du démon auxquelles les chrétiens ont renoncé à leur baptême… C’est en vain que vous allégueriez la raison politique, la raison d’Etat qui vous force à protéger, autant qu’il peut dépendre de vous, tous les arts et toutes les industries qui font fleurir une nation ; c’est en vain que vous prouveriez que ces fêtes ont pour résultat de faire circuler dans toutes les veines du corps social l’argent qui en est le sang, pour le faire parvenir de mains en mains jusqu’à celles du pauvre. […] Que peuvent donc avoir de coupable aux yeux de Dieu les pleurs que nous versons avec Andromaque, avec Iphigénie, et les sanglots que nous arrache le désespoir de Clytemnestre, quand sa fille, sa fille chérie, enlevée à ses embrassements, marche à l’autel pour y être sacrifiée à l’ambition de son père par la main d’un prêtre… Que peut avoir de coupable aux yeux de la divinité notre rire, à la brusquerie d’un tuteur justement trompé ; celui qu’excite le désespoir d’un avare qui se croit volé, se fouille lui-même, interroge tout ce qui l’entoure, et nous aussi spectateurs ?