Je ne dis pas que ç’a été la morale de gens foibles et instruits, bornés dans leurs vues et timides ou précipités dans leurs décisions : outre leur sainteté qui nous les rend vénérables, nous sçavons que c’étoient les premiers génies du monde ; nous avons en main leurs écrits, et nous y voyons la sublimité de leur sagesse, la pénétration de leur esprit, la profondeur et l’étendue de leur érudition. […] Si c’est votre main, coupez-la, et privez-vous de tout le service qu’elle pourroit vous rendre : Si manus tua scandalisat te, abscinde eam. […] Or si c’est enfin votre pied, ne l’épargnez pas, parce qu’il vaut bien mieux perdre votre pied, votre main, votre œil, tout votre corps, que de vous mettre en danger de perdre votre ame ; Bonum tibi est. Pourquoi pensez-vous, Chrétiens, que le fils de Dieu se servît de cet exemple du pied, de l’œil, de la main ? […] Rien dans l’ordre naturel ne m’est plus précieux que mon œil, rien ne m’est plus utile que ma main pour les actions de la vie, c’est mon pied qui me soutient et qui me conduit ; mais afin de me garantir d’une chûte mortelle, dont je serois menacé en les conservant, il n’y a ni œil, ni pied, ni main que je doive ménager : il faut sacrifier tout pour sauver l’essentiel et le capital, qui est la vie de l’ame : Si manus tua vel pes tuus scandalisat te, abscide eum et projice abs te.