Si, dans les ouvrages de belles Lettres, les Savants ont soin de laisser au Lecteur intelligent le moyen d’occuper son esprit, soit en devinant, ou même en ajoutant quelque fois aux idées qui lui sont présentées, et que l’Auteur, dans cette intention, n’aura pas tout à fait développées, j’ai cru que je ne pouvais rien faire de mieux que d’imiter une conduite également sage et utile ; parce qu’elle ne dérobe rien au Lecteur ignorant (pour qui il y en a toujours assez) en même temps qu’elle procure un vrai plaisir au Lecteur de génie et de goût, qui est bien aise de pouvoir mettre quelque chose du sien à sa lecture. Au surplus, parmi les gens de Lettres il y en a qui sont, plus que tous les autres, en droit de me critiquer sur ce point : ce sont les Auteurs dramatiques. […] 10 La fameuse querelle que cette Ecrivain eut dans ce temps là avec le Tasse et ceux de son parti, est assez connue des gens de Lettres : avec ce secours je me défiais moins de ma raison, quoique j’ai toujours cru que je devais avoir plus de ménagement qu’un autre en écrivant ; et c’est par ce motif que je n’ai jamais expliqué ouvertement mes idées.