Les révolutions que la Comédie a éprouvées dans ses premiers âges, & les différences qu’on y observe encore aujourd’hui, prennent leur source dans le génie des Peuples & dans la forme des Gouvernemens : l’administration des affaires publiques, & par conséquent la conduite des Chefs, étant l’objet principal de l’envie, & de la censure dans un Etat démocratique, le Peuple d’Athènes, toujours inquiet & mécontent, devait se plaire à voir exposer sur la Scène, non-seulement les vices des Particuliers, mais l’intérieur du Gouvernement ; les prévarications des Magistrats, les fautes des Généraux, & sa propre facilité à se laisser corrompre & séduire. […] On s’amuse à recopier le Petit-maître, sur lequel tous les traits du ridicule sont épuisés, & dont la peinture n’est plus qu’une école pour les Jeunes-gens qui ont quelque disposition à le devenir : cependant on laisse en paix l’Intriguante, le Bas-orgueilleux, le Prôneur-de-lui-même, & une infinité d’autres dont le monde est rempli : il est vrai qu’il ne faut pas moins de courage que de talent pour toucher à ces caractères ; & les Auteurs du Faux-Sincère & du Glorieux ont eu besoin de l’un & de l’autre : mais aussi ce n’est pas sans effort qu’on peut marcher sur les pas de l’intrépide Auteur du Tartufe. […] Que le Dramatiste laisse mettre au rang des Farces Georges-Dandin, le Malade-imaginaire, le Bourgeois Gentïlhomme, les Fourberies-de-Scapin, & qu’il tâche de les imiter. […] Molière a tiré des contrastes encore plus forts du mélange des Comiques, dans le Festin-de-Pierre, où il nous peint la crédulité de deux petites Villageoises, qui se laissent séduire par un scélérat dont la magnificence les éblouit.