J’ai lu quelque part, que les Lacédémoniens firent une Loi, par laquelle il était ordonné, que lorsqu’un mauvais Citoyen aurait ouvert un bon avis, avant de le communiquer à toute l’assemblée du Peuple, on devait faire répéter la même chose à un homme vertueux ; & quoique celui ci n’eût pas été capable de l’imaginer, c’était néanmoins de sa part qu’on la proposait à la multitude : « De peur, ajoutait le divin Législateur de Sparte, qu’une maxime sage, un decret utile ne parussent sortir d’une source impure, & que par cette raison, on ne se crût autorisé à y déroger. » J’ai trouvé cette conséquence si juste, qu’elle va servir de fondement au Projet de Réforme que je propose pour le Comédisme : nous ferons passer par le canal de bouches innocentes, les sentimens d’honneur, les maximes de grandeur d’âme, d’humanité, de fidélité, que nous voudrons inspirer à la Nation. […] nt en ne proposant aux Acteurs que des objets d’imitation non-seulement honnêtes (ce qui est indispensable) mais dans qui l’on voye un degré de vérité, qui les rende intéressans ; & de bonté, de sagesse, ou de critique, qui nous y fasse trouver de quoi nous toucher, nous instruire, ou nous inspirer de l’éloignement des choses vicieuses. […] C’est ce qui fait qu’on ne peut lire sans indignation, quel usage fesaient les Romains des jeunes Princes Asiatiques, qui leur étaient remis en ôtage : ils ne négligeaient rien pour les corrompre & les efféminer, en les rabaissant à l’humiliant emploi d’amuser la populace de Rome sur le Théâtre : ils les traitaient comme des Esclaves, afin de leur en inspirer la vileté & les sentimens. […] Œdipe, ni Phèdre, Syphax ni le jeune Horace, Agamemnon, Oreste, Atrée, Mahomet, n’enseigneront, ni l’inceste, ni le parricide, ni la cruauté, ni le fanatisme ; ils en inspireront plutôt de l’horreur.