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234. (1760) Lettre à M. Fréron pp. 3-54

Gresset, cet art que les Prophètes ont rendu si respectable, cet art si justement appelé par les Païens le langage des Dieux : le mauvais usage qu’on en a pu faire ne doit pas le faire proscrire, ou bien il faudrait par la même raison, ne plus méditer sur les Saintes Ecritures ; puisque les hérétiques en ont abusé par les sens forcés qu’il leur a plu de donner à quelques passages : je sais bien que des spectateurs impies, au lieu de s’en tenir au sens naturel d’une pensée croient souvent voir une impiété enveloppée dans un vers très innocent en soi, ils veulent croire, par exemple, que nos Ministres Ecclesiastiques sont attaqués et la Religion outragée dans ces deux vers de la Tragédie d’Oedipe de Mr. de Voltaire, Nos Prêtres ne sont pas ce qu’un vain peuple pense : Notre crédulité fait toute leur Science. […] Ce n’est pas cependant que je croie qu’on ne puisse faire mieux ; si vous vous sentiez la force nécessaire pour employer tous vos loisirs envers Dieu, vous pécheriez mortellement de ne pas vous livrer à ses saintes inspirations ; mais si vos passions sont trop tumulteuses, et qu’il n’y a qu’un plaisir innocent qui puisse vous en distraire, je vous conseille de le prendre.

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