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234. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quinzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre III. Aveux importans. » pp. 83-110

Tout le monde aime la volupté, sur-tout la jeunesse qui s’imagine lui être consacrée ; les Poëtes & les Peintres peignent la volupté comme une jeune personne couchée sur un lit de fleurs, environné de tout ce qui flatte les sens ; toutes les passions bouiliantes à cet âge où la chair vigoureuse qui n’a point encore été mortifiée, domine avec insolence, & s’en fait même un privilège, & rien de plus ordinaire au théatre & dans le monde que de dire que la sagesse n’est faite que pour les vieillards, & le bel âge pour les plaisirs ; ceux qui ont des inclinations plus heureuses n’osent les suivre, le respect humain l’entraîne dans la foule, il est emporté par le torrent & on les excuse. […] Je sais tout cela ; aussi je ne défends point à une femme de se plaindre, mais je veux qu’elle se plaigne toue bas, que la vanité quoique blessée étouffe sa tendresse ou du moins en ôte l’éclat ; enfin je trouve infiniment mauvais qu’une maîtresse, parce qu’elle est abandonnée, aille faire en face à son Amant de ces reproches qui marquent le besoin qu’elle a encore de lui, & qui selon le procédé du cœur humain, ne servent qu’à assurer l’infidélité de son amant ; savez-vous que ce sont ces belles représentations là qui produisent le peu de respect que les hommes ont pour nous.

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