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24. (1643) Les Morales chrétiennes « Des Théâtres. » pp. 511-519

Le peuple est bien aise d’entendre le secret des cœurs et des conseils ; d’entrer dans l’intelligence des causes, que la police et que les passions lui cachent ; de se rendre juge des Princes, qui se font la guerre, pour lui donner du plaisir. […] Mais parce que la fin de la comédie est de délecter, et que les pratiques de la vertu ne sont pas celles qui plaisent le plus à notre nature, on les a quittées pour représenter ce qui peut être dans la complaisance des passions, et l’on se propose pour dernière fin, une volupté qui est l’amorce commune de tous les vices ; et d’autant que ces acteurs veulent donner de l’admiration, ils vous font voir des prodiges de méchanceté, des usurpateurs qui s’élèvent dessus les trônes par toutes sortes de crimes, en mettant sous leurs pieds, tous ceux qui ne peuvent servir autrement à leur fortune : des inimitiés éternelles ; des vengeances toujours extrêmes ; la cruauté n’épargne ni l’âge, ni le mérite, ni le sexe ; elle s’étend jusques aux derniers degrés d’une famille, et jusques aux cendres des défunts ; ce ne sont que duels, que guerres, qu’assassinats, où pour donner plus de compassion, l’innocence demeure toujours opprimée.

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