Et l’on veut qu’une vertu naissante, ou, pour mieux dire, que des gens sans vertu, la plupart même déjà vaincus par les ennemis qu’ils vont chercher, soient dans ces assemblées sans danger. […] Une salle, le rendez-vous de tous les libertins, et de tout ce qu’on appelle dans une ville gens oisifs, gens de plaisirs : peu dont les mœurs ne soient corrompues, moins encore qui soient de bonnes mœurs : une assemblée où règne un luxe étudié, où tout éblouit, où tout brille, et dans laquelle il ne se trouve pas une jeune personne qui n’ait employé tout ce que l’art a de plus séduisant pour plaire et pour tenter : Des loges pleines d’écueils d’autant plus dangereux qu’ils sont plus à couvert, et d’où les yeux peuvent rassembler plus d’objets à la fois, tous plus à craindre. […] N’est-ce pas vouloir prendre les gens de bien pour des stupides, et tout ce qu’il y a de personnes sages, pour des idiots qui n’ont nulle connaissance du cœur humain, que de vouloir nous faire accroire qu’il n’y a nul danger, que tout est innocent dans ces spectacles ? […] un objet trop mondain vu par hasard, un mot trop libre dit sans dessein, une lecture peu modeste faite sans malice, mettent en danger la vertu la plus affermie, et sont très souvent des sources de réprobation : et tout ce que la passion a de plus vif et de plus empoisonné, tout ce que l’art de tenter a de plus fin et de plus poli ; un assemblage de tout ce qui peut séduire, ne sera ni une occasion prochaine de péché, ni un manifeste danger à des gens nourris, la plupart dans une criminelle mollesse, nourris même dans le péché ! […] Ces faux Prophètes, qui s’étudient à ne dire jamais rien qui ne plaisent, et qui tâchent de se faire accroire à eux-mêmes que c’est l’esprit de Dieu qui les guide, seront-ils bien reçus à dire qu’ils ne pensaient pas qu’il y eût du mal d’assister quelquefois aux spectacles, quand le Seigneur leur demandera compte de tant de gens qui s’y seront perdus ?