victimes de nos applaudissements insensés, n’apprendrons-nous jamais combien mérite de mépris et de haine tout homme qui abuse, pour le malheur du genre humain, des talents que lui donna la nature ! […] Dans un sentiment de mépris pour la faiblesse d’un empereur et d’un Romain, qui balance comme le dernier des hommes entre sa maîtresse et son devoir ; qui, flottant incessamment dans une déshonorante incertitude, avilit, par des plaintes efféminées, ce caractère presque divin que lui donne l’histoire ; qui fait chercher, dans un vil soupirant de ruelle, Titus, le bienfaiteur du monde et les délices du genre humain. […] Il dit, à la vérité, qu’il a conçu une haine effroyable contre le genre humain, mais la raison qu’il rend de cette haine en justifie pleinement la cause : ce n’est pas des hommes qu’il est ennemi, mais de la méchanceté des uns, et du support que cette méchanceté trouve dans les autres. S’il n’y avait ni fripons ni flatteurs, il aimerait tout le genre humain. […] Ce Philinte est le sage de la pièce, un de ces honnêtes gens du grand monde, dont les maximes ressemblent beaucoup à celles des fripons, de ces gens si doux, si modérés qui trouvent toujours que tout va bien, parce qu’ils ont intérêt que rien n’aille mieux ; qui sont toujours contents de tout le monde, parce qu’ils ne se soucient de personne ; qui, de leur maison bien fermée, verraient voler, piller, égorger, massacrer tout le genre humain sans se plaindre, attendu qu’ils sont doués d’une douceur très méritoire à supporter les malheurs d’autrui.