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54. (1767) Essai sur les moyens de rendre la comédie utile aux mœurs « Essai sur les moyens de rendre la comédie utile aux mœurs — SECONDE PARTIE. Si les Comédies Françoises ont atteint le vrai but que se propose la Comédie. » pp. 34-56

Je devrois peut-être pour l’examen de cette importante question, faire passer en revue tous les Auteurs qui ont travaillé dans le genre comique ; mais j’espere que le Lecteur me pardonnera aisément de ne prendre que Moliere pour exemple. Car outre que l’examen de tous les Auteurs comiques me jetteroit dans une discussion qui n’auroit point de bornes, c’est que Moliere est sans contredit, le Poëte qui a le plus illustré la scène comique ; ceux qui ont travaillé dans le même genre, bien loin de l’avoir surpassé, ne l’ont imité que de très-loin. […] Je laisse à part toutes les Comédies de Moliere, qui quoique très-bonnes dans leur genre, n’attaquent aucun vice essentiel, & n’offrent la peinture que de quelques originaux plus ridicules que dangereux. […] La misanthropie est certainement un vice dangereux : un misanthrope est ennemi des hommes : ce n’est pas seulement en déclamant contre le genre humain, qu’il dévoile son caractere, c’est par ses actions & sa conduite : un homme de cette trempe refusera de rendre service à ses semblables, parce qu’il les hait : il quittera sa femme & ses enfans, à qui sa présence est nécessaire, pour aller vivre seul au fond d’un désert.

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