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59. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — [Première partie.] — Septième Lettre. De la même. » pp. 73-99

A la bonne heure : admettons le plaisir comme délassement nécessaire ; les danses & la Musique comme procurant ce délassement : les Drames Français, comme renfermant toujours quelque leçon utile, comme éclairant l’esprit, formant le cœur, nous apprenant à nous tenir sur nos gardes ; le Théâtre de la Nation comme une Ecole du monde, où les jeunes-gens achèveront leur éducation avec moins de danger qu’au milieu de bien des cercles. […] Le premier, probablement, parlait des anciennes Tragédies Grecques, où l’on voit les trahisons, les meurtres, les incestes, les parricides ; des Pièces satyriques d’Aristophane ; des Comédies de Plaute & de Térence, qu’une Française lui abandonne de bon cœur : l’autre n’a sans doute en vue que de conserver à sa bicocque de Genève, dont je me soucie très-peu, son urbanité suisse, le droit de s’ennivrer, l’agrément de médire à son aise, & le plaisir, un peu plus réel pour la jeunesse des deux sexes, de danser quelquefois ensemble. […] Un Français, pour se réjouir, veut être animé par les regards des Belles ; loin d’elles il languit. Un Anglais, en se noyant de punch & de thé, s’amuse à règler l’Etat, fronde le Ministère, & souscrit pour Wilkes ; le Germain oublie tout à force de rasades ; le Français existe par les femmes : si quelquefois elles l’amolissent, plus souvent encore un coup-d’œil, un sourire de leur part ont suffi pour faire des héros. […] Ce mot n’est pas mis ici par flaterie ou par hasard ; dans une monarchie telle que celle des Français, l’amour des Souverains, vraiment pères d’un Peuple qu’ils ont affranchi de la tyrannie féodale, est la même chose que l’amour de la Patrie.

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