L’Eglise, la conscience, & les fréquens naufrages de l’innocence, sont ces voix, qui disent, que de tous les moyens, qu’a le démon pour perdre bien des ames, la comédie en est le plus doux, le plus fort, & le plus caché. […] Tout cela, ne sont-ce pas autant de fortes attaques, données par les yeux, & par les oreilles, au cœur des personnes, qui écoutent ce qui se déclame, & qui voyent le spectacle d’une comédie, pour y porter des impressions d’amour, en leur amolissant la volonté ; en leur gravant dans l’i-imagination des images, & des representations moins honnêtes ; & en leur laissant dans la memoire des idées, qui ont toûjours quelque chose de sensuel ? […] Je demande si cette disposition de l’esprit, & du cœur secondant elle-méme les sollicitations moles, & douces de ces objets, il est possible, qu’on s’en défende, sans s’y laisser aller fort sensüellement ? […] Je ne diray pas, que c’est pécher mortellement, d’aller à la comédie ; mais je diray, qu’à plusieurs c’est péché mortel, d’y aller : La verité de cette proposition ne se prend pas simplement du spectacle, mais encore des dispositions particulieres de la personne, Elle est, par exemple, d’un tempérament doux & très-sensible ; elle a un cœur, qui prend aussi-tôt feü ; l’imagination en est vive & forte, pour conserver la molesse, & l’impureté des images ; la volonté en est naturellement foible, & facile, pour se laisser aller à toutes ces representations ; elle a l’expérience de ces desordres secrets, qu’elle a plûtôt aimez, qu’elle n’a combatus. […] Me direz vous maintenant, que l’on voit des personnes de bonne vie, & de bonnes mœurs, qui sans tant de façon vont à la comédie, comme les autres, & qu’ainsi l’on est fort justifié, quand on agit sur leur exemple ?