Quoique les Tragédies et les Tragi-comédies soient tenues pour fort honnêtes en comparaison des Comédies ; cela n'empêchait pas que l’impudicité et plusieurs autres habitudes très dangereuses n’y fussent décrites fort naïvement, puisque ces Pièces avaient été composées par des Poètes Païens qui faisaient gloire des mauvaises actions que les Chrétiens ont depuis condamnées. […] Il faut observer ici qu’ils ont toujours eu dans l’imagination, qu’en ce qui est de leurs Tragédies et de leurs Tragi-comédies, elles sont d’un style fort honnête, et que personne n’y peut trouver à reprendre. […] Les nouveaux Critiques trouvent encore beaucoup à réformer en la façon de s’habiller des Comédiennes et en toutes leurs actions et leurs manières de parler, croyant que l’habit, le geste, la prononciation, et tout ce qui est en elles s’accorde fort à la licence des paroles qu’elles récitent et à leur sujet. […] On dit qu’un grand Seigneur aimait si fort ce divertissement, qu’il voulait faire établir un Professeur pour la Poésie du Théâtre, comme il y en a pour l’Eloquence et pour les Mathématiques ; Qu’il entendait que celui-ci instruisît les Poètes qui voudraient faire des Comédies ou des Tragédies, afin qu’ils n’y missent rien qui ne fût convenable. […] On ajoute une proposition assez judicieuse qui est, que comme l’on examine toute sorte de Livres avant que de permettre de les imprimer, et de les communiquer au public, il faudrait qu’il y eût un Magistrat qui examinât, ou qui fît examiner par Gens experts, les Pièces que l’on voudrait faire jouer devant le peuple, afin que leur représentation ne pût nuire à personne : Mais des Censeurs inexorables diront que d’ériger une Académie pour les Comédiens, ce serait autoriser leur Profession, comme si elle était fort nécessaire au public ; Et pour ce qui est du reste, qu’au lieu de donner la peine à un Magistrat d’examiner les Comédies dignes d’être représentées, il vaudrait mieux les condamner entièrement ; Que par ce moyen on ne craindrait ni brigue, ni surprise, et l’on ne se mettrait point au hasard d’en recevoir du dommage.