Il est deux choses que les hommes vains ne trouvent jamais trop fortes, la flatterie pour eux-mêmes, la médisance contre les autres : ainsi tout concourut d’abord à favoriser la Comédie Satyrique. […] Georges-Dandin, où sont peintes avec tant de… sagesse [J’avais peine à le lire] les mœurs les plus licencieuses, est un chef-d’œuvre de naturel & d’intrigue ; & ce n’est pas la faute de Molière si le sot orgueil, plus fort que ses leçons, perpétue encore l’alliance des Dandins avec les Sotenvilles. […] Molière a tiré des contrastes encore plus forts du mélange des Comiques, dans le Festin-de-Pierre, où il nous peint la crédulité de deux petites Villageoises, qui se laissent séduire par un scélérat dont la magnificence les éblouit. […] De ces trois genres, le premier est le plus utile aux mœurs, le plus fort, le plus difficile, & par conséquent le plus rare : le plus utile aux mœurs, en ce qu’il remonte à la source des vices, & les attaque dans leur principe ; le plus fort, en ce qu’il présente le miroir aux hommes, & les fait rougir de leur propre image ; le plus difficile & le plus rare, en ce qu’il suppose dans son Auteur une étude consommée des mœurs de son siècle ; un discernement juste & prompt, & une force d’imagination qui réunisse sous un seul point de vue les traits que sa pénétration n’a pu saisir qu’en détail. […] Tels sont les trois genres de Comique, parmi lesquels nous ne comptons ni le Comique de mots, si fort en usage dans la Société, faible ressource des esprits sans talens, sans étude & sans goût ; ni ce Comique obscène qui n’est plus souffert sur notre Théâtre que par une forte de prescription, & auquel les honnêtes-gens ne peuvent rire sans rougir ; ni cette espèce de travestissement, où le Parodiste se traîne après l’original, pour avilir, par une imitation burlesque, l’action la plus noble, la plus touchante ; genre méprisable, dont Aristophane est l’auteur.