Quel seroit le sort des familles, des princes, des états, si leur état flotant au gré du hazard, dépendoit du caprice, de l’inconstance, des crimes des deux époux ? […] Une fille d’une famille honnête ayant passé la nuit chez le Comte, attendoit le matin pour s’en retourner sans être connue, lorsque la maison fut investie pendant le siège qu’il soutint, ayant des affaires plus pressées que la sortie de sa maitresse ; il la confia à son valet-de-chambre, qui crut ne pouvoir mieux la faire évader que de la déguiser en homme, lui donner un habit de son maître & la descendre avec une corde dans un jardin voisin. […] Il est surprenant que, dans toutes les guerres que sa famille a eu avec le roi de Suede & le roi de Prusse, qui toutes furent si malheureuses, ce grand guerrier ne soit jamais venu à son secours, & n’y ait joué aucun rôle : mais il n’est pas surprenant que le grand Frederic, ayant pris Dresde, chassé l’Electeur, fait prisonnieres sa femme & ses filles, il ait mené le même jour à la comédie une famille si comédienne.