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23. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quinzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre I. Des Parfums. » pp. 7-32

Qui peut résister à tant de parfums de toute espèce ? […] La passion pour les odeurs est criminelle aussi, c’est une espèce d’ivresse ; c’est ce que peignoit Catulle par ces paroles : cette odeur est si agréable que pour la mieux sentir, vous prierez les Dieux de vous faire tous nez, quod cum olfacies, Deos rogabis totum ut te faciunt fabulle nasum . […] Mais dans l’homme, le goût pour les bonnes odeurs est aussi ancien & aussi étendu que le monde, quoiqu’infiniment diversifié dans les espèces & dans les degrés ; l’un aime une odeur pour laquelle l’autre a de la répugnance. […] Comme il y a des drogues aromatiques, des liqueurs spiritueuses, des alimens échauffans qui allumant dans le sang un feu séditieux, une fermentation tumultueuse, excitent le feu de la concupiscence ; il est aussi des odeurs qui produisent ce dangèreux effet, elles s’élèvent comme une vapeur, & sont comme une espèce d’extrait de cette pernicieuse nourriture, & ce qu’il y a même en elle de plus subtil & de plus capable d’empoisonner, Sinibaldus avec tous les Médecins l. […] Je ne suis pas surpris que les femmes aiment tant les odeurs, elles sont sujettes à mille infirmités qui saisissent l’odorat ; pardonnons leur d’avoir recours à un remède si nécessaire, c’est une espèce de fard, le rouge prépare le défaut de la couleur, le parfum celui des odeurs ; on veut en faire une espèce de grâce, & lui donner un air de délicatesse.

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