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151. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre IX. Sentiments de S. Cyprien et de quelques autres Pères. » pp. 175-201

Un Chrétien doit garder soigneusement ses yeux et ses oreilles ; nous nous accoutumons bientôt au crime que nous entendons : « Oculi et aures custodiendæ ; scito assuescimus in scelera quæ audimus. » L’homme, trop porté au vice, est si facile à tomber ; que deviendra-t-il, s’il y est poussé par l’exemple ? […] Du dégoût on en vient au mépris, à l’incrédulité : « Cum ad religionem accesserint litterati minus credunt. » Si vous ne voulez pas vous tromper vous-même, fuyez donc ces voluptés pernicieuses dont l’âme se repaît et s’empoisonne, comme le corps des viandes délicieuses ; préférez la vérité à l’erreur, l’éternité au temps, l’utile au frivole : « Qui non vult se ipsum decipere, abjiciat noxias voluptates. » Ne vous plaisez à voir que des actions justes et pieuses, à entendre que ce qui nourrit l’âme et nous rend meilleurs ; n’abusez pas de vos sens, qui ne vous ont été donnés que pour apprendre l’enseignement et la volonté de Dieu. Si vous aimez le chant, chantez, aimez à entendre chanter ses louanges. […] Grégoire de Nazianze, et Eusèbe : Il y a des villes où sans jamais se lasser on ne s’occupe, du matin au soir, qu’à repaître ses yeux des spectacles des Comédiens, à entendre et à chanter des vers galants, des chansons licencieuses, qui portent à toute sorte d’impureté : « Quæ multam in animis libidinem pariunt. » Bien des gens sont assez aveugles pour croire ces peuples heureux, parce que négligeant leurs affaires et les travaux nécessaires à la vie, ils passent leur temps dans le plaisir et l’oisiveté : « Per inertiam et voluptatem vitæ tempus traducunt. » Peuvent-ils ignorer que le théâtre est une école publique de libertinage ? […] Le crieur (la cloche) appelle-t-il à l’Eglise, on n’est jamais prêt, on s’y traîne lentement, avec peine ; la trompette invite-t-elle à la comédie, on y vole, tout trouve des ailes : « Tuba personuit, et omnes alis instructi currunt. » Celui qui vient à l’Eglise, entend la parole de Dieu et les cantiques des Anges ; que voit-il, qu’entend-il au théâtre ?

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