On le prend par la main, on l’habille d’une belle robe, on le méne au milieu de l’assemblée, & l’appellant par le nom du mort qu’on lui donne : Un tel, dit-il, est mort, le voilà ressuscité, je vous le présente ; il sera toujours ressemblable à lui-même, plein de sagesse & de courage ; il battra tous vos ennemis : vous devez le servir & lui obéir. […] Quand on a pris la résolution de faire la guerre, ou qu’au retour de la campagne, on en rend compte à la nation, on en imite en pleine assemblée toutes les opérations, & toujours dansant, chantant, d’abord on va sur la pointe du pied, ensuite en rempant pour se mieux cacher, regarder au loin à la découverte de l’ennemi. Quand on l’a découvert, on se cache dans les broussailles, on se met en embuscade pour le surprendre, on en vient aux mains, on combat, & sans doute on remporte la victoire, comme on fait en des siéges simulés, où l’on donne des batailles feintes ; tantôt on appelle l’ennemi à grands cris, on vient donner l’alerte, on emporte des chevelures, on lie des prisonniers. L’opéra donne ainsi des combats de Persée, de Bellérophon, &c. fait des guerres sanglantes, contre des ennemis de toile on de carton. […] Le partage est si bien fait, l’opposition si bien reconnue, qu’on n’oseroit placer dans la Chapelle aucun des Dieux du théâtre, ni aucun image de dévotion au théâtre c’est le jugement anticipé, où les bons sont à la droite, & les méchans à la gauche : sous quel de ces drapeaux ennemis marchez vous ?