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44. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre onzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre III. De la Dédicace de la Statue de Voltaire. » pp. 71-94

Arouet vaut bien Alexandre, ses conquêtes dans l’empire des lettres, ne sont pas moins étendues, sa reputation moins brillante ; les ennemis qu’il a vaincus, ne sont ni moins nombreux, ni moins puissants. Pigalle est son Bucephale, ses antousiastes sont autant de Rois dans la littérature ; la Clairon & la Statira, il est plus que fils de Jupiter, c’est un véritable Apollon, qui inspire les poëtes, tout l’empire des lettres se tait en sa présence, & tombe à ses genoux. […] Les villes célebrent ces fêtes avec le plus grand éclat, tout l’empire des lettres devoit solemniser de même la dédicace des statues de leurs Princes ; il en avoit comme les villes, fait les frais, il devoit en faire les honneurs. […] Le principal empire de Voltaire est le Parnasse, c’est là qu’assis sur un trône d’or, il prononce des oracles, il donne des loix en souverain, il pese le mérite des auteurs, il apprécie leurs ouvrages, il distribue l’immortalité, il sourit aux jolies actrices, & leur adresse ses vers ; il foudroye ses envieux, il écrase les reptiles, il enrichit les libraires, & met un impôt sur les éditions qu’il multiplie à l’infini, & qu’il fait voler ses productions & celles des autres, sous son nom, au-dela des mets, dans les terres australes.

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