La Musique excite & attache notre attention comme la Poësie, par une espéce de langue qui lui est particuliere, & qui ne nous parle que par les rapports des sons : elle nous affecte encore plus que la Poësie, même par la douceur du nombre & de l’harmonie, qui n’a tant de charmes pour nous que parce qu’en ébranlant avec une justesse & une convenance parfaite les cordes de cet instrument naturel qui y répond dans nos oreilles, elle cause dans notre ame une émotion aussi douce qu’agréable ; elle frappe, pour ainsi dire, les ressorts de toutes les passions par des accords qui les excitent ou les rappellent : elle les justifie aussi en un sens & les authorise comme la Poësie dramatique, par la douceur qui est attachée aux dispositions qu’elle inspire dans l’ame, qui en s’y livrant a de la peine à croire que ce qui lui paroît si innocent & qui est si agréable, puisse jamais lui être funeste, ni qu’un plaisir dont elle fait son bonheur actuel, soit capable de la rendre moins parfaite.