Ulysse, par exemple, à la faveur de sa cicatrice est reconnu d’une façon par sa Nourrice, & d’une autre façon par ses Bergers. » [Il y a moins d’art dans cette derniere, où Ulysse découvre exprès sa cicatrice, pour vérifier son discours, au lieu que dans l’autre c’est sa Nourrice qui le reconnoît en la voyant. […] Nous n’avouons pas toujours cette disposition d’esprit, principe de nos actions ; mais elle se manifeste par nos discours. […] Comme l’harmonie d’un discours contribue beaucoup à nous y rendre attentifs, Aristote veut que l’imitation d’une Action soit faite dans un stile très-agréable à l’oreille, & cependant il ne met la Diction qu’à la quatriéme place. Le Poëte le plus parfait de tous nos versificateurs, pensoit de même, puisqu’il disoit que sa Tragédie étoit faite, lorsqu’ayant, après de longues méditations, arrêté la conduite de l’Action, les caracteres, & les discours qu’il devoit faire tenir à ses Personnages, il ne lui restoit plus à faire que les Vers. […] Dans un Spectacle fait pour enchanter les hommes, l’harmonie du discours doit enchanter leurs oreilles, ainsi celle de la Prose ne peut suffire.