Etes-vous du nombre de ceux qui n’admettent aucune bonne raison de devenir misantrope, et qui craignent d’être assimilés à un pareil homme ? […] D’ailleurs, le mal n’aurait été que suspendu, et serait tombé sur la génération suivante qui, privée par là de bons exemples, d’encouragements, ou d’instructions, serait devenue également la proie de l’école dominante de corruption. Au surplus, la paix dont l’on aurait pu jouir sous ce caractère ne pouvait pas être de longue durée, puisque la misantropie a été mise aussi en spectacle et vouée au ridicule ; que depuis cette époque le mot misantrope est devenu synonyme de ceux de bourru, d’homme sauvage, d’ours, etc. […] Ne devient-il pas de plus en plus sensible qu’il ne peut être avantageux ou agréable qu’aux disciples de la dernière école de mettre en spectacle, de cette sorte, l’image des vertus qui les inquiètent et les condamnent ; et qu’eux seuls devraient le désirer pour leur vengeance et leur satisfaction ? […] Vous voyez dans leur histoire que, comme nous aussi, par ou malgré leurs Ménandres et leurs Aristophanes, ils furent légers, frivoles ; que comme nous ils allaient se dégradant tous les jours ; qu’ils firent de même des progrès rapides dans l’irréligion et la corruption, et qu’ils sont devenus enfin ce que tout le monde sait, et ce que nous deviendrons sans doute aussi prématurément, si nous ne prenons une autre marche qu’eux.