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48. (1775) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-septieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre III. Théatre de Pologne. » pp. 80-105

Ensuite le Roi fit l’ouverture du bal avec la femme du ministre russe, où se trouverent 2000 masques ; on dansa jusqu’à six heures du matin. […] On y trouvera toutes les commodités imaginables en tous genres : tous les jeux, sans distinction, y sont permis, même ceux de hasard, par-tout défendus ; il y aura sale de comédie, sale de bal où chacun pourra danser, sale de repas où l’on pourra donner des déjeûnés, une bonne cuisine fournira tout ce qu’on voudra ; des petits cabinets très-propres pour des jolies actrices, à un prix raisonnable. […] Il faut présumer charitablement que cette farce se sit par dévotion : il vouloit imiter le roi David, qui dansa devant l’Arché quand on la transportoit. […] L’actrice comptant sur le pouvoir de ses charmes & la protection de son amant, déclara fiertement qu’elle ne vouloit plus danser avec lui. […] Le théatre ne forme pas des vaillans preux : celui-ci peu fait à des pareils gestes, voulut se retirer : mais un autre prince se déclare son chevalier, accepte le défi, prend son bouclier & son casque, & se montre dans le champ de bataille, pour soutenir l’honneur de son favori, le fait monter sur le théatre danser une passecaille, & jette à ses pieds une boutse de cent cinquante ducats, qu’il avoit ramassés dans une collecte faite charitablement pour lui dans toute la ville, l’assurant qu’il n’avoit rien à craindre, qu’il le défendroit jusqu’au dernier soupir, & feroit plus pour lui qu’on n’avoit fait pour la République.

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