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80. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre VI. Du Cardinal Mazarin. » pp. 89-108

Mais une pièce dramatique régulière, partagée en scènes et en actes, formant un dessein, un nœud, un dénouement, accompagnée de chant, de danses, de machines, où l’on ne parle qu’en chantant, où l’on ne marche qu’en dansant, un spectacle où tout est réuni pour flatter le cœur, l’esprit, les yeux, les oreilles, que l’histoire de l’Opéra appelle « le spectacle universel, le triomphe de l’esprit humain, le grand œuvre par excellence », et qui en effet bien mieux que celui des Chimistes, fait couler des fleuves d’or dans la main des Acteurs, et une pluie d’or dans le sein des Danaé qui habitent ce pays des Fées ; on ne le connaissait qu’en Italie, il avait été ébauché en faveur de la maison de Médicis, à qui on doit en Europe la naissance des arts et du luxe. […] Il est vrai que les Persans prisent les choses selon leur valeur ; quoiqu’ils aiment infiniment les Danseuses et les Musiciennes, ils regardent la danse comme un art infâme, surtout pour les femmes. […] Les danses animent aux plaisirs les plus séduisants ; quoique d’une manière différente, les mêmes objets toujours également flatteurs, produisent le même effet, ils inspirent toutes les passions. […] Le Roi, tout occupé de danses, de musique, de jeu, de spectacles, le laissa maître absolu jusqu’à sa mort ; il en profita pour amasser jusqu’à deux cent millions qu’on trouva dans ses coffres. […] Cahusac, qui dans son Traité de la Danse, nous apprend que le Concile de Trente donna le bal à Philippe II, Roi d’Espagne, et que le Cardinal Légat, Président, en fit l’ouverture par une gavotte.

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