Il y a peu de cœurs absolument mauvais, comme il y en a peu d’absolument bons ; un homme qui n’auroit que des vices sans aucune trace de vertu, seroit une espece de monstre dans la nature ; un homme qui n’auroit que des vertus, sans aucune ombre de défauts, seroit un véritable prodige ; mais le monstre & le prodige sont également rares, ou plutôt on n’en trouve jamais de semblables dans le monde ; on remarque dans tous les hommes un mêlange de bien & de mal, une inclination naturelle pour l’ordre, une pente encore plus forte pour le désordre : ceux mêmes qui s’y laissent le plus entraîner, ne le font pas toujours, & à l’égard de toutes sortes d’objets : ils ont des intervalles de lumiere & de raison, pendant lesquels ils ne sont pas insensibles aux attraits de la Vertu.