J’ajoute encore que, dans notre siècle, les amateurs de la Comédie ne s’exposent guère à recevoir des leçons que sur le Théâtre ; et que ce motif, fût-il seul, devrait suffire pour faire revivre la Comédie, s’il n’y en avait pas ; afin d’apprendre leurs vérités à des hommes qui, sans cela, les ignoreraient éternellement ; puisqu’il n’est que trop commun d’être aveugle sur ses propres défauts, pendant qu’on est si clairvoyant sur ceux des autres. […] n’y a parmi vous, leur dit-il, ni Poète, ni aucune autre personne assez zélée, pour vous reprocher avec affection, et pour mettre au jour vos défauts et ceux de toute la Ville ; s’il vous arrive, par bonheur, qu’il en paraisse quelqu’un, vous devez l’embrasser avec la plus grande amitié, et le recevoir avec autant de joie et de solemnité, que si vous célébriez un jour de fête…. » Peu après il ajoute : « Si quelqu’un prend l’extérieur de Philosophe, dans la vue du gain, ou par vaine gloire et non pas pour votre utilité, il ne mérite pas que vous le receviez ; on peut le comparer à un Médecin qui, visitant un grand nombre de malades, ne pense à rien moins qu’à les guérir, mais à leur distribuer des couronnes et des parfums, à leur mener des femmes de mauvaise vie, et par conséquent à irriter leurs maladies et à les rendre incurables. […] Concluons donc, avec les Partisans du Théâtre, que, si on abolissait la Comédie, on ferait un grand tort à la République ; puisqu’il ne resterait plus de moyen d’inspirer de l’horreur pour le vice et de donner du goût pour la vertu à ce grand nombre d’hommes qui, comme nous l’avons déjà dit, ne vont guère à d’autre Ecole que le Théâtre, et qui, sans les leçons qu’ils y reçoivent, ignoreraient, toute leur vie, leurs défauts, loin de travailler à s’en corriger.