Les Protestans des deux Royaumes, la Reine d’Angleterre & le Roi de Navarre se soutenoient mutuellement, ils pensèrent se brouiller quand Henri se fit Catholique, la Reine en fut offensée & n’avoit pas tort, il abandonnoit ses amis & sa Religion, se mettoit dans la nécessité de les combattre, & faisoit courir un grand risque aux Protestans des deux Royaumes & de Hollande qui avoient droit de comprer sur lui ; elle le traitoit d’ingrat, de lâche, d’apostat, disoit qu’il étoit plus comédien qu’elle, qu’après avoir été long-temps à la tête du parti, il avoit renoncé à sa Religion, par crainte sous Charles IX qu’il y étoit retourné ensuite, & l’abjuroit une seconde fois par intérêt, pour se livrer bassement au Pape, elle retira ses troupes qu’elle avoit envoyées au secours d’Henri, qui dans le premier moment la traita de Comédienne. […] La crainte d’une invasion n’étoit pas son plus grand crime ; Elisabeth la craignoit peu, elle se voyoit bien affermie sur son trône ; l’Ecosse seule n’étoit pas en état de faire la guerre, & la France depuis la mort de François II sans enfans, n’y prenoit plus d’intérêt ; mais un principe secret & plus vif de son inimitié étoit la jalousie de beauté Marie étoit incomparablement plus belle, plus aimable, & même plus savante, mais moins rusée, moins dissimulée, moins politique, moins hautaine.