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30. (1762) Lettres historiques et critiques sur les spectacles, adressées à Mlle Clairon « Lettres sur les Spectacles à Mademoiselle Clairon. — LETTRE III. » pp. 29-67

Saint Augustin qui assista à ce Concile, en avoit conservé tout l’esprit, lorsqu’il assure en son Commentaire sur l’Evangile de Saint Jean, que les dons faits aux gens de Théâtre ne sont point au rang des libéralités honnêtes ; c’est une prodigalité la plus vicieuse & la plus horrible. […] Dans ce Conventicule on a discuté sans doute les objections triomphantes qui sont énoncées dans le Mémoire ; la premiere que je saisis est l’origine sacro-sainte de la Comédie Françoise, dès l’année 14021 ; il s’étoit introduit en France, parmi les Confreres de la Passion, une sorte de Comédie bizarre où l’on représentoit nos saints mystéres, Charles VI. assista à plusieurs représentations : ces pieux Auteurs, (dont vous & votre troupe, Mademoiselle, si nous nous en rapportons au témoignage de votre Avocat, êtes descendues en ligne droite,) dressoient leur Théâtre en une Chapelle, tout le profit passoit dans les mains des pauvres : ce Spectacle, tout religieux qu’il étoit en son objet, ne put conserver long-tems sa décence premiere, il admit des fourrures profanes, qui attirerent un interdit sur toute la piéce. […] Si ce contrepoids avoit existé dès l’onziéme, siécle, l’Église n’auroit point à gémir des proscriptions d’Hildebrand, * & de quelques-uns de ses Successeurs, elle auroit conservé l’Angleterre ; c’est une censure indiscrette qui lui a enlevé ce triple Royaume, & peut-être une grande partie de l’Allemagne. […] Omnes verò Laïcos monemus ut honorem ecclesiasticum conservent, & à Sacerdotibus jejunia communiter indicta reverenter observent, & suos observare doceant, & compellant ut dies Dominicus, sicut decet, colatur, & ut liberiùs fieri possit, mercata & placita à Comitibus illo die prohibeantur.

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