C’est un peché plus grand que plusieurs ne le croyent, de contribuer à l’entretien des Acteurs de ces méchantes Pieces, & d’autoriser par sa presence, par sa bienveillance, & par son appuy, des personnes dévoüées à corrompre les mœurs ; c’est trahir sa conscience, & le salut public, que d’entretenir les plus dangereux ennemis de Dieu, que de nourrir & de soûtenir les causes des plus grands maux que les hommes ayent à craindre. […] Les peres & les meres n’ont pas assez de charité pour leurs enfans, s’ils souffrent qu’ils s’engagent en ces dangers où ils ne pourroient en conscience leur permettre de s’exposer, s’il ne s’agissoit que de la fortune & de la vie. […] Ils ne peuvent pas en conscience permettre qu’on jouë des Pieces si dangereuses, supposé qu’ils en soient avertis, sans les faire examiner, & reformer, à moins qu’ils ne croyent que la vertu merite moins leur soin que la santé, que le bien, que le repos, à moins qu’ils ne croyent que l’Estat est moins interessé dans la conservation de l’innocence, que dans la sureté de la fortune, & de la vie. […] Mais quelles delices plus agreables que le mépris mesme des delices, que la pureté de la conscience, que l’affranchissement des frayeurs de la mort ? […] Non, Messieurs, non, Dieu n’est pas seulement offensé par les crimes que le theatre inspire quelquefois ; on l’offense en effet quand on vient à la Comedie, sans sçavoir si la Piece qu’on doit joüer est innocente ou criminelle, ou mesme dangereuse, & on ne peut pas exposer sa conscience & son salut à ce hazard, sans offenser celuy qui nous défend une indiscretion si contraire à la crainte que nous devons avoir de luy déplaire, & de le perdre.