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19. (1731) Discours sur la comédie « PREMIER DISCOURS SUR LA LETTRE DU THEOLOGIEN DEFENSEUR DE LA COMEDIE » pp. 2-32

Il n’est certainement pas possible qu’on ne trouve étrange, qu’un Prêtre obligé par son état à inspirer aux fidèles la fuite des divertissements dangereux, les y porte par un Ouvrage exprès, et qu’il détermine à faire des Comédies un Auteur qui craint de blesser sa conscience dans un semblable travail. Peut-être aurait-on de la peine à le croire, s’il ne l’avait dit lui-même en commençant sa Lettre. « Je ne puis plus tenir, dit-il, contre l’obstination et l’importunité de vos prières, et pour vous guérir de la crainte scrupuleuse où vous êtes que votre conscience ne soit intéressée dans les ouvrages de votre esprit, etc. […] « Je me sens accablé, dit-il dès la deuxième page, par un torrent de passages, de Conciles et de Pères, qui depuis le premier jusqu’au dernier ont tous fulminé contre les spectacles, et ont employé la ferveur de leur zèle, et la vivacité de leur éloquence pour en donner une si grande horreur aux fidèles, que les consciences faibles et timorées ne veulent pas même qu’il soit permis d’en disputer, et traitent de pernicieux et de relâchés, les Docteurs qui ont l’indulgence de les tolérer. » I. […] Que l’Apologiste des Comédiens apprenne donc même des gens du monde, à n’attribuer à la Comédie qu’un très petit avantage par rapport à quelques affectations ridicules et à quelques défauts purement extérieurs : ce qui n’est rien en comparaison des maux réels et souvent irréparables qu’elle produit dans les consciences. Qu’il soit convaincu qu’appeler la Comédie moins une Ecole du vice que de la vertu ; c’est une proposition téméraire, scandaleuse et qui blesse les oreilles pieuses : Qu’il a insulté aux saints Décrets en déclarant que les Comédiens pouvaient en sûreté de conscience jouer tous les jours sans excepter les plus solennels, pourvu que quelques personnes voulussent avoir le plaisir de la Comédie.

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