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418. (1781) Lettre à M. *** sur les Spectacles des Boulevards. Par M. Rousseau pp. 1-83

Je suis fort éloigné d’adopter le sentiment de ces Rigoristes, qui, sans les avoir approfondis & examinés sous tous leurs points de vue, qui, peut-être même sans les connaître, condamnent les Spectacles en général, ou de ces Réformateurs éternels qui, non contens des dangers qu’ils croyent appercevoir dans les Jeux les plus innocens, se créent exprès des monstres pour avoir le plaisir de les combattre. […] Ne souffrez pas qu’il y ait parmi vous un seul homme oisif ; rendez à la terre les bras qu’elle vous redemande… Si vous ne remédiez promptement à ces excès dont vous frémissez, c’est en vain que vous vanterez la sévérité de vos Loix, & votre Police admirable ; le mal ne fera qu’empirer de jour en jour : en effet, en tolérant la mauvaise éducation que l’on donne à la jeunesse dans les Tripots du Boulevard, en souffrant que ses mœurs se corrompent sous nos yeux, & en punissant les crimes qu’elle commet dans un âge plus avancé, crimes que nous aurions dû prévoir & prévenir par la suppression de tous les objets dangereux ; dites-moi si ce n’est pas élever, au milieu de nous, des scélérats, pour avoir le plaisir de les condamner, un jour, au supplice ?

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