Il nous est défendu d'être spectateurs des duels, de peur que nous ne devenions complices des meurtres qui s'y font: Nous n'osons pas assister aux autres Spectacles, de peur que nos yeux n'en soient souillés, et que nos oreilles ne soient remplies de vers profanes qu'on y récite; comme lors qu'on décrit les crimes, et les actions tragiques de Thyeste, et qu'on représente Terrée mangeant ses propres enfants; et il ne nous est pas permis d'entendre raconter les adultères des Dieux, et des hommes, que les Comédiens attirés par l'espoir du gain, célèbrent avec le plus d'agrément qu'il leur est possible: Mais Dieu nous garde, nous qui sommes Chrétiens, dans qui la modestie, la tempérance, et la continence doivent reluire, qui regardons comme seul légitime le Mariage avec une seule femme, nous chez qui la chasteté est honorée, qui fuyons l'injustice, qui bannissons le péché, qui exerçons la justice, dans qui la Loi de Dieu règne, qui pratiquons la véritable Religion, que la vérité gouverne, que la grâce garde, que la paix protégé, que la parole divine conduit, que la sagesse enseigne, que Jésus-Christ qui est la véritable vie régit, et que Dieu seul règle par l'empire qu'il a sur nous: Dieu nous garde, dis-je, de penser à de tels crimes, bien loin de les commettre. […] Vous ne tuerez point, vous n'adorerez point les Idoles; vous ne commettrez point d'adultère; vous ne déroberez point; vous ne ferez point injure à votre prochain. […] Quelque bon et modéré que soit l'usage que les hommes peuvent faire des Spectacles, selon leur dignité, selon leur âge, ou même selon la condition de leur nature, néanmoins leur esprit n'est point si insensible qu'il ne soit agité de quelque passion secrète: nul ne reçoit de plaisir sans affection; et il n'y a point d'affection qui ne soit accompagnée de ces circonstances, qui l'excitent: Que si quelqu'un assiste à la Comédie sans affection et sans plaisir, il ne laisse pas d'être coupable du péché de vanité, allant en un lieu où il ne profite de rien; Or j'estime que la vanité ou l'occupation en des choses inutiles est un péché dont nous devons nous éloigner: Mais d'ailleurs celui qui assiste à la Comédie, ne se condamne-t-il pas lui-même, puis qu'en ce qu'il ne voudrait pas être semblable à ces Acteurs, il confesse qu'il les déteste: Quant à nous, il ne nous suffit pas de ne commettre rien de semblable; mais nous sommes encore obligés de ne point favoriser de notre consentement, et de notre approbation ceux qui commettent ces crimes: si vous voyez un larron, dit le Roi Prophète, Ps. 49. v. 18. […] Si les Tragédies et les Comédies sont des représentations de crimes et de passions déréglées, elles sont sanglantes, lascives, impies, et d'une dépense désordonnée, car la représentation d'un crime énorme, ou d'une chose honteuse n'est point meilleure que ce qu'elle représente: Comme il n'est point permis d'approuver un crime dans l'action qui le commet, il n'est pas aussi permis de l'approuver dans les paroles qui nous le font connaître. […] Il répondit hardiment, j'ai eu droit de le faire, puisque je l'ai trouvée dans un lieu qui m'appartient: Une autre femme étant aussi allée à une Tragédie, la nuit suivante elle vit en songe un suaire, et il lui sembla qu'on lui reprochait la faute qu'elle avait commise d'avoir assisté à cette Tragédie, en lui représentant même le nom de l'Acteur; ce qui l'effraya tellement qu'elle mourut cinq jours après: Combien d'autres exemples y a-t-il de ceux qui suivant le party du Démon dans les Spectacles, ont secoué le joug du Seigneur, car personne ne peut servir deux Maîtres: Quel commerce peut-il y avoir entre la lumière et les ténèbres; entre la vie, et la mort.