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20. (1767) Réflexions sur le théâtre, vol 6 « Réflexions sur le théâtre, vol 6 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SIXIÈME. — CHAPITRE VII. De la Dévotion des Comédiens. » pp. 160-179

Les pieces qu’on représente réveillent sans cesse à l’Actrice l’idée de son amant : comme elles roulent toutes sur l’amour, on en sent plus vivement l’impression ; on s’applique ce qu’on chante, on déclame, on substitue l’amant à l’Acteur ; on se voit en lui, on lui parle ; on entre dans le sentiment du rôle qu’on joue, on le réalise en soi-même, on en réussit mieux, & on le fait mieux passer dans l’ame des spectateurs. […] Geliotte, qui se préparoit aussi avec les autres à ses pâques, a chanté les principaux rôles. […] Il est vrai que pendant la maladie de M. le Dauphin ils firent cesser le spectacle, ce qui n’est pas trop conséquent, & que de leur côté les Acteurs du Concert établi sous la protection de M. l’Evêque, au lieu des scènes d’Armide, de Roland, d’Hypolite, chantèrent le Miserere, sans pourtant prendre la discipline, non plus que nos saints Pénitens. […] Il est vrai que par ordre du Prélat un Grand Vicaire ad hoc examine toutes les scènes d’opéra qu’on y chante, & pour écarter les mauvaises pensées a grand soin de substituer les mots d’ami & d’amitié aux termes profanes d’amant & d’amour, souvent, il est vrai, aux dépens de la mesure & de la rime, mais au grand profit des bonnes mœurs. […] La signature donnée, on chanta le Deum, on donna la bénédiction du Saint Sacrement, & on se retira dans le même ordre, le Prince à pied, les Dames sur leurs carreaux, & de là s’en allèrent à la comédie.

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